Un généticien américain crée la première cellule vivante synthétique

ne cellule synthétique qui possède son propre ADN ? Le pionnier du séquençage du génome humain, le biologiste américain Craig Venter, a dévoilé, jeudi 20 mai, la création de la première cellule vivante dotée d'un génome synthétique. Une "étape importante scientifiquement et philosophiquement", explique le chercheur, dans la compréhension des mécanismes de la vie et qui ouvre la voie à la fabrication d'organismes artificiels.

"Il s'agit de la création de la première cellule vivante synthétique, au sens où celle-ci est entièrement dérivée d'un chromosome synthétique", explique Craig Venter, créateur de l'Institut du même nom et coauteur du premier séquençage du génome humain rendu public en 2000. "Ce chromosome [élément porteur de l'information génétique contenant un groupe de gènes de l'organisme] a été produit à partir de quatre flacons de substances chimiques et d'un synthétiseur, et tout a commencé avec des informations dans un ordinateur", poursuit-il.

VERS LA BIOLOGIE SYNTHÉTIQUE

Cette percée "change ma vision de la définition de la vie et de son fonctionnement", ajoute ce chercheur, un des coauteurs de ces travaux parus dans la revue américaine Science datée du 21 mai. "Cette approche est en effet un très puissant instrument pour tenter de concevoir ce que nous attendons de la biologie et nous pensons ainsi à une gamme étendue d'applications", précise-t-il.

Craig Venter avait annoncé en 2008 être parvenu avec son équipe à fabriquer un génome bactérien 100 % synthétique en collant des séquences d'ADN synthétisées bout à bout afin de reconstituer le génome complet de la bactérie Mycoplasma genitalium. L'avancée annoncée jeudi découle de ces travaux antérieurs et ouvre effectivement la voie à des applications environnementales et énergétiques.

Le génome qu'ils ont fabriqué est la copie d'un génome existant, celui de la bactérie mycoplasme mycoïde, mais avec des séquences d'ADN supplémentaires pour l'en distinguer. Ils ont ensuite transplanté ce génome synthétique dans une autre bactérie, appelée microplasme capricolum, réussissant à "activer" les cellules de cette dernière. "Si ces techniques peuvent être généralisées, la conception, la synthèse, l'assemblage et la transplantation de chromosomes synthétiques ne seront plus des obstacles aux progrès de la biologie synthétique", soulignent les auteurs de ces travaux.

"BOÎTE DE PANDORE"

C'est ainsi que selon Craig Venter, ces chercheurs vont tenter de concevoir des algues capables de capturer le dioxyde de carbone (CO2), principal gaz à effet de serre, et de produire de nouveaux carburants propres. Des recherches sont aussi en cours pour accélérer la production de vaccins, fabriquer de nouvelles substances chimiques, des ingrédients alimentaires et des bactéries capables de purifier l'eau.

Qualifiant de "boîte de Pandore" ces travaux, Pat Mooney, directeur de l'ETC Group, organisme international privé de surveillance des technologies dont le siège est au Canada, estime que "la biologie synthétique est un champ d'activité à haut risque mal compris, motivé par la quête du profit". "Nous savons que les formes de vie créées en laboratoire peuvent devenir des armes biologiques et menacer aussi la biodiversité naturelle", ajoute-t-il. Le Craig Venter Institute a déposé des brevets recouvrant certaines des techniques décrites dans les travaux publiés jeudi.

LEMONDE.FR avec AFP | 21.05.10

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