ETAIT-CE AUSSI DIFFICILE DE DEVELOPPER ?

Empruntez l'autoroute du Nord. La pluie y a causé quelques ravages ces temps-ci. Mais empruntez-la quand même. Vous ne la reconnaîtrez pas, comme moi. Pas un seul centimètre carré de bitume n'y a été ajouté. Mais vous ne la reconnaîtrez pas. Mais en ouvrant l'oil et en s'efforçant un peu, l'on constate que l'autoroute semble être devenue un peu plus large, simplement parce que les herbes têtues qui avaient envahi le terre-plein central ont été débroussaillés, ce qui permet de voir l'autre voie du sens inverse. Les immenses termitières que les fourmis dans leur défiance de notre autorité désordonnée avaient construites sur les bords de l'autoroute ont été détruites. Je suppose qu'il n'a fallu que quelques jours pour donner un nouveau visage à l'autoroute du Nord.

Etait-ce aussi difficile d'effectuer ces travaux de réhabilitation ? Pourquoi pendant des années, le peu d'infrastructures qui nous restaient ont-elles été aussi abandonnées ?

Au carrefour de l'Indénié, la belle ouvre d'un précédent Ministre reste toujours sous la menace des eaux de pluie. C'est comme si la météo avait décidé de ne pas nous laisser de répit, au moment où nous avons besoin de concentration. Mais depuis quelques semaines des machines géantes s'affairent à désabler, en aval jusqu'à la lagune et en amont jusqu'au Camp Agban. La tâche est difficile puisque ne s'agit pas seulement d'enlever le sable et les détritus pour laisser couler l'eau, mais il s'agit aussi de déboucher les négligences politiques sur les questions de développement des infrastructures. Etait-ce aussi difficile de faire semblant de poser des carterpillars et des tracteurs sur ces lieux qui se transforment en océan, viennent les pluies ?

Remontez vers l'est, dans le sens d'Aboisso, les routes recouvrent un nouveau visage. Ca faisait bien longtemps que nous n'avions pas vu de manouvres avec leurs machettes s'affairer à couper les herbes au bord de la route. Dans Abidjan, des femmes s'occupent à balayer les routes, à mener une bataille quotidienne contre l'insalubrité. Elles gagneront cette bataille puisque de gros engins sont annoncés pour tout ramasser. Ce sont ces mêmes Ivoiriens qui étaient là, disponibles, quand les immondices s'amoncelaient. Pourquoi ne pas en avoir tenu compte depuis ?

Etait-ce aussi difficile de poser de petits actes flatteurs ? Le pays reprend progressivement des couleurs et des formes. La période de diète est en train de passer. Les soldats-racketteurs continuent, eux, de s'ingénier à trouver de nouvelles formes d'extorsion de fonds, même aux morts. Ils disent que ce sont leurs chefs qui le leur demandent. Nous demanderons des comptes à ces chefs bandits, la justice doit concerner tout le monde et les tenants du pouvoir d'abord. Mais le pays se transforme doucement mais sûrement. Lorsque les petites et moyennes entreprises auront remis leurs unités en état de marche et auront reçu des garanties de financement ou de réparation fiscale, la transformation sera encore plus rapide.

Il faut profiter de l'état de grâce diplomatique et international. Lorsqu'elle s'adressait à la tribune de l'Union Africaine il y a quelques semaines, la Secrétaire d'Etat Américaine Hilary Clinton a classé la Côte d'Ivoire au nombre des bons exemples de transition démocratique. Ceci a déjà commencé et va continuer à se traduire en pièces sonnantes et trébuchantes à travers des financements importants multilatéraux et bilatéraux. C'est ce qui avait manqué à notre économie jusque-là. Certes, le pays ne peut pas vivre en quémandant et en tendant la main. Mais il a besoin d'un peu de soutien pour qu'il se remette à flot. Même l'économie des grandes puissances a eu besoin, à un moment donné de leur histoire, de ce soutien. Etait-ce difficile d'obtenir des financements si nous nous conformions aux règles démocratiques ?

Nous sommes tombés si bas que nous sommes réduits à contempler et à nous extasier devant des gestes ordinaires de balayage des rues et de ramassage des ordures. Notre histoire nous a imposés le re-calcul de nos échelles d'appréciation. Mais s'il faut partir de là pour rebondir, alors assumons.

 Article publié le: 13 Juillet 2011 - Auteur: VINCENT TOHBI IRIE - Source: Lebanco.net

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