Gratuité des soins : du rêve au cauchemar

Au lendemain de l’indépendance, la Côte d’Ivoire avait fait le choix, dans sa politique sanitaire, de la gratuité des soins (consultation, médicaments et examens paramédical). Cette politique a été possible grâce à  une forte croissance économique soutenue par le café et le cacao. On parla alors de miracle économique. Mais, la crise économique du milieu des années 80 va contraindre la Côte d’Ivoire, sous la pression des bailleurs de fonds (FMI et Banque mondiale), à abandonner cette politique de haute portée sociale au début des années 90. La Côte d’Ivoire va alors opter pour le recouvrement des frais de santé à des tarifs accessibles.

Lorsque Alassane, vainqueur de la présidentielle de 2010 prend les reines du pouvoir après une terrible guerre post-électorale, il décide, dans la précipitation et sans avoir cerné tous les contours d’une telle décision, d’instaurer la gratuité des soins dans tous les établissements sanitaires publiques pour une période de deux mois. Cette décision de haute portée sociale pour soulager un temps soit peu les populations qui ont énormément souffert lors de la crise post-électorale qui a connu son dénuement par une guerre d’un mois aurait du être mieux préparée, semble devenir définitive. Cette mesure qui devait soulager les populations démunies est entrain de se transformer en cauchemar. Elle produit l’effet contraire : celui d’alourdi la facture sanitaire des populations et d’enrichir le privé qui finalement en est le principal bénéficiaire. En effet, la plupart des services médico-techniques des CHU et des hôpitaux sont formés (imagerie médicale et laboratoire) ; les blocs opératoires d’un nombre important de formations sanitaires sont fermés par manque d’oxygène ; pratiquement plus de médicaments dans les hôpitaux. On se dirige inéluctablement vers la paralysie du système sanitaire ivoirien si cette politique perdure dans ces conditions d’un manque criard de financement.

La Côte d’Ivoire post-crise où tout est à réhabiliter ou à reconstruire, où on prévoit un déficit du Pib d’environ 6% en 2011 peut-elle se permettre le luxe d’une politique de gratuité des soins ? Je crois qu’une politique sanitaire intelligente, dans la situation d’urgence actuelle de la Côte d’Ivoire, devrait être axée sur la réhabilitation et l’équipement des formations sanitaires existantes et la mise en place d’une assurance maladie. Cette assurance maladie aura l’avantage de permettre à toutes les populations de recevoir des soins de qualité et permettre le financement du système sanitaire. Le gouvernement doit avoir le courage de reconnaître qu’il est dans l’incapacité d’assurer comme il se doit le financement de cette politique de gratuité.

Eburnie , vendredi 26 Août 2011

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